vendredi, 20 septembre 2013
Tu seras un homme …
© Jacques Deslandes - texte déposé à la sacem (Adaptation libre d’après R. Kipling)
Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie
Et sans trop d’amertume te mettre à reconstruire,
Si tu peux oublier les injures et les cris
Pour peu qu’on te rende un sourire
Si au beau temps d’aimer tu deviens fou d’amour
Ivre de joie, d’espoir, mais surtout de tendresse,
Si te sachant haï, sans haïr à ton tour
Tu ne renies pas ton ivresse ;
Si toutes tes paroles sont traduites en mensonges
Comme autant de poignards qu’on plante dans ton dos,
Si tu sais rester fier même en jetant l’éponge
Sans mentir toi même d’un seul mot ;
Si tu peux rester digne au côté des puissants
Mais défendre les humbles, dénoncer la misère,
Si, découvrant la honte du pouvoir de l’argent
Tu sais raviver ta colère ;
Si tu peux méditer, observer et connaître
Sans trop désespérer des hommes en leur fureur,
Si tu sais préférer l’esclave à son maître,
Te faire l’ennemi du malheur ;
Si tu peux être dur quand l’autre est le plus fort,
Si tu peux être faible quand l’autre est un enfant,
Si tu sais être bon jusqu’au soir de ta mort
Même si ton monde est méchant ;
Si tu peux rencontrer succès après défaites
Sans jamais être dupe des raisons qui t’y mènent,
Si tu sais faire briller ce soleil dans ta tête :
L’amour de la famille humaine ;
Alors rires et pleurs, colères, défaites, victoires,
Seront autant de marches que tu auras gravies
Et plus vrai que ces dieux enrubannés de gloire,
Tu seras un homme, mon fils.
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lundi, 03 juillet 2006
Rideau
© Jacques Deslandes - texte déposé à la sacem
Imagine que la vie soit comme une pièce de théâtre,
9 mois plus tôt, on frappe les 3 coups.
Et 9 mois plus tard ...
Pour ce tout petit frère
Que le hasard nous donne
Qui déchire sa mère
Au premier cri de l’homme
Rideau !
Pour cet étrange nain
Qui t’éveille la nuit
Et qui serre les poings
Et s’accroche à la vie
Rideau !
Pour ce curieux démon
Qui fréquente les fées
Et fait de ta maison
La maison d’un sorcier
Rideau ! Rideau ! Rideau !
Pour ce poète-roi
Qui invente des mots
En effaçant du doigt
La buée des carreaux
Rideau !
Pour cet adolescent
Qui rêve à la ronde
Qu’un jour il sera grand
Et refera le monde
Rideau !
Pour cette fille qui sourit
Sans préméditation
Et jette l’incendie
Dans le corps du garçon
Rideau ! Rideau ! Rideau !
Pour son premier baiser
Obtenu au chantage
Quand deux mains affolées
Dansent sur un corsage
Rideau !
Pour le premier matin
Qu’il se réveille deux
Pour le premier matin
Qu’on l’appelle «Monsieur»
Rideau !
Et pour la grande fête
Des jours renouvelés
Pour la joie satisfaite
De s’être mérités
Rideau ! Rideau ! Rideau !
Sur le flux des années
Qui passent et le bousculent
Et qui vont l’entraîner
Jusqu’à son crépuscule
Rideau !
Sur le fuite des jours
Qui tarit ses ivresses
Et tricote à l’amour
Son châle de tendresse
Rideau !
Sur la grève où soudain
Il se sent échoué
Avec au creux des reins
La rouille des années
Rideau ! Rideau ! Rideau !
Sur ce froid qui le glace
Et lui siffle la nuit
«Dieu comme le temps passe
Et comme tu as vieilli»
Rideau !
Sur cette main qui tremble
Quand il veut caresser
Ce gosse qui lui ressemble
Et l’appelle «Pépé»
Rideau !
Sur cette voix qui lui crie
Je ne veux pas mourir
On ne m’a pas tout dit
Je veux encore vieillir
Rideau ! Rideau ! Rideau !
Sur ce carré de terre
Où s’arrête le temps
Le temps d’une prière
Et d’un Saint-Sacrement
Rideau !
Sur ce carré de terre
Où sa vie n’est plus rien
Qu’une étrange chimère
Enfouie dans son écrin
Rideau !
Sur ce carré de terre
Homme où tu n’es plus rien
Qu’un nom sur une pierre
Qui nous dit « A demain »
Rideau ! Rideau ! Rideau !
23:45 Publié dans Les Mots que je te dis ... | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : auteur, littérature, poète, diseur de poème, la vie, poésie, homme | | Facebook | | | Imprimer | |
samedi, 11 mars 2006
Tu n’emporteras rien avec toi
De Pierre Béarn (1990)
Homme,
qui que tu sois
tu n’emporteras rien
avec toi.
Homme inhumain par habitude
ou par conviction,
Abel façonné par la vie
en Caïn pour les carnages,
quand donc jetteras-tu
tes masques de peinturlures
tes lauriers de prédateur ?
Tu n’emporteras rien
avec toi
Rien n’était urgent dans la vie
mais tu fus toujours pressé d’écraser
quiconque se mouvait dans d’autres couleurs.
Couleurs de peau, couleurs d’idées,
couleurs de tous les drapeaux coupables,
couleur des uniformes truqués.
Tu n’emporteras rien
avec toi
Iraniens, Irakiens, qu’espérez-vous
sur vos champs puants de pétrole ?
Israéliens, Palestiniens,
n’étiez-vous pas du même sang ?
Et vous mes Africains,
mes rois nègres, mes nomades
des sables quadrillés par les Blancs
pourquoi jaillir en ennemis
hors du feu chantant de vos danses ?
Vous n’emporterez rien
avec vous.
O mes peaux Rouges de l’enfance
mes Arméniens de la vengeance,
peuples bafoués et méprisés
et vous ! coffres-forts de l’aisance
vous n’emporterez rien
avec vous.
Est et Ouest dressés
en face à face dérisoire
où donc prenez-vous vos points cardinaux ?
Vous n’emporterez rien
avec vous.
Policiers et soldats victimes
des voix de l’anonymat,
peuples mal soumis des usines
et vous, mes clochards de la vie
vous n’emporterez rien avec vous.
Hommes déchirés de races
et de convictions ennemis,
Hommes drogués, saoulés d’argent
dans la fermentation des convoitises,
qui donc pourrait vous pardonner
dans l’au-delà ?
Vous n’emportrez rien
avec vous.
Que tu sois né du Christ ou de Lénine
de Mahomet ou de Bouddha
ou d’un ventre mal défini
tu n’emporteras rien
avec toi.
Voir aussi un autre extrait de ses textes "L'hymne à la bête" qu'il a eu la gentillesse de me dédicacer.
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